Les pagnolades

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claude
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Les pagnolades

Message par claude » 12 déc. 2005 à 17:50

Les anchois des Tropiques
L'ONCLE
C'est toujours la même chose. Et ça sera toujours la même chose. On ne saura jamais, on ne saura jamais qui c'est qui a laissé la corbeille de croissants sous le robinet du bidon de pétrole. Non, ça on ne le saura pas. Et j'aurais beau faire une enquête policière, voilà une affaire dont je ne saurai jamais rien.

CASIMIR
En tout cas, il y a une chose que je sais, c'est que ce n'est pas moi.

LA TANTE
Moi, j'étais à la messe. Je sais que ce n'est pas moi non plus.

L'ONCLE
Alors, qui est-ce ?
Il regarde Irénée d'un air soupçonneux.

IRÉNÉE (innocent)
C'est peut-être un client de l'épicerie qui en voulant prendre un croissant a tiré le panier sans faire attention, et de telle façon que le panier de croissants est venu se placer sous le robinet du bidon de pétrole ?

L'ONCLE
Tu en as pris, toi, des croissants ?

IRÉNÉE
Oui, naturellement, j'en ai pris ce matin pour mon petit déjeuner. Pour me nourrir.

L'ONCLE
Ça, non.

IRÉNÉE
Pourquoi ça non ?

L'ONCLE
Parce que tu manges, mais tu ne te nourris pas.
Celui qui te nourrit. c'est moi... Ton père. qui était mon frère, ne l'aurait pas fait. C'était un brave homme, oui, mais il n'aimait pas qu'on se fiche de lui.

IRÉNÉE
Tu me l'as déjà dit bien souvent.

L'ONCLE
Et ça n'a jamais servi à rien.

IRÉNÉE (souriant)

Alors à quoi ça sert de me le redire ?

L'ONCLE

Oh! Je sais bien que j'ai tort. J'ai tort d'espérer qu'un jour tu comprendras qu'il faut travailler pour vivre, et que le métier d'épicier est aussi honnête qu'un autre, et qu'un grand galavard de vingt-cinq ans pourrait fort bien aider son oncle, oncle qui l'a recueilli, qui l'a nourri, et qui continue à le nourrir, en s'esquintant le tempérament.

IRÉNÉE
Je vois clairement où tu veux en venir. Tu vas me dire que je suis un bon à rien.

L'ONCLE
Oh que non ! Bon à rien, ce serait encore trop dire. Tu n'es pas bon à rien, tu es mauvais à tout. Je ne sais pas si tu me saisis, mais moi, je me comprends.


IRÉNÉE
Je te saisis, et je suis profondément blessé.
Il essuie une larme.

L'ONCLE
Voilà comme il est! Il fait des grimaces et tout ce qu'on peut lui dire il s'en fout. Ton frère, au moins, lui, il est reconnaissant. Lui, il travaille dans le magasin, et il met un point d'honneur, lui, à se tenir au courant de nos difficultés. (A voix basse.) Le baril d'anchois qui était moisi, c'est lui qui a réussi à le vendre à M. Carbonnières, l'épicier des Accates... Et pourtant c'était difficile : les anchois avaient gonflé, ils étaient pleins de petits champignons verts, on les aurait pris pour des maquereaux. Eh bien, il l'a vendu, ce baril !

IRÉNÉE
Il est aveugle, Monsieur Carbonnières ?

CASIMIR (modeste)
Je lui ai dit que c'étaient des anchois des Tropiques.

L'ONCLE (ravi)
Voilà! Voilà l'idée, voilà l'imagination! Il a trouvé ça, lui !

IRÉNÉE
Oh lui, lui, moi je sais bien ce que c'est qui lui a monté l'imagination, à lui.

CASIMIR
Et qu'est-ce que c'est ?

IRENEE (à son frère)
Tu savais très bien que ces anchois, si tu ne les avais pas vendus, c'est nous qui les aurions mangés. Oui, ici, sur cette table, les anchois des Tropiques, nous les aurions vus tous les jours. Jusqu'à la fin du baril, ou jusqu'aux obsèques tropicales de la famille.[...]

LA TANTE
Irénée, tu sais que si l'oncle se met en colère...

IRÉNÉE
Oh! Si l'oncle se met en colère, il va s'étouffer comme d'habitude. Et ça me ferait de la peine parce que l'oncle, malgré sa sauvagerie envers moi, je l'aime beaucoup.

La porte sonne.

CASIMIR
Qu'est-ce que c'est ?
La.face d'un client paraît au guichet.

LE CLIENT
Vous en avez encore des anchois des Tropiques ?

L'ONCLE
Non. Pour le moment, nous en manquons.

LE CLIENT
Et quand c'est que vous en aurez ?

IRÉNÉE
Oh! Il faut du temps pour les faire! Dans deux ou trois mois, quand ils seront mûrs.

LE CLIENT
Et je pourrais en trouver ailleurs ?

IRÉNÉE
Impossible. Spécialité de la maison.

LE CLIENT
Alors-tant pis. Merci quand même !

On entend encore une fois la sonnette qui tinte, pour la sortie du client. L'oncle se lève, et serre la main de Casimir avec enthousiasme.

L'ONCLE
Bravo! (à Irénée) Voilà une fière leçon pour toi! Admire cet enfant! (il prend affectueusement Casimir par les épaules). Il nous arrive une catastrophe, un désastre. Cinquante kilos d'anchois se moisissent sans rien dire. Eh bien lui, de notre désastre, il fait une Spécialité. Il crée un poisson nouveau, un poisson auquel Dieu n'avait pas pensé, et il en fait une friandise inconnue !

IRÉNÉE
Il a peut-être eu tort de vendre tout le paquet au même épicier, celui des Accates. Parce que ce paisible village, sa friandise va peut-être le dépeupler en quinze jours, car le poisson nouveau va les empoisonner.

L'ONCLE (sarcastique)
C'est ça. Dénigre-le! Reproche-lui son initiative! Casimir, je te félicite. Voilà dix francs pour tes menus plaisirs. Et n'écoute pas les sarcasmes de l'Inutile (un temps). J'ai une envie terrible de me mettre en colère.
Dernière édition par claude le 12 déc. 2005 à 18:08, édité 1 fois.

Mike
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Les pagnolades

Message par Mike » 12 déc. 2005 à 18:04

Merci Claude :D

Mike

claude
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Message par claude » 12 déc. 2005 à 18:07

La partie de cartes:
Marius



Acte Troisième

Il est neuf heures du soir. dans le petit café, Escartefigue, Panisse, César et M. Brun sont assis autour d'une table. Il jouent à la manille. Autour d'eux, sur le parquet, deux rangs de bouteilles vides. Au comptoir, le chauffeur du ferry-boat, déguisé en garçon de café, mais aussi sale que jamais.


Scène 1

(Quand le rideau se lève, Escartefigue regarde son jeu intensément, et, perplexe, se gratte la tête. Tous attendent sa décision.)


Panisse (impatient)

Eh bien quoi ? C'est à toi !


Escartefigue

Je le sais bien. Mais j'hésite …

(Il se gratte la tête. Un client de la terrasse frappe sur la table de marbre.)


César (au chauffeur)

Hé, l'extra ! On frappe !

(Le chauffeur tressaille et crie)


Le chauffeur

Voilà ! Voilà !

(Il saisit un plateau vide, jette une serviette sur son épaule et s'élance vers la terrasse.)


César (à Escartefigue)

Tu ne vas pas hésiter jusqu'à demain !


M. Brun

Allons, capitaine, nous vous attendons !

(Escartefigue se décide soudain. Il prend une carte, lève le bras pour la jeter sur le tapis, puis, brusquement, il la remet dans son jeu.)


Escartefigue

C'est que la chose est importante ! (à César) Ils ont trente-deux et nous, combien nous avons ?

(César jette un coup d'œil sur les jetons en os qui sont près de lui, sur le tapis.)


César

Trente.


M. Brun (sarcastique)

Nous allons en trente-quatre.


Panisse

C'est ce coup-ci que la partie se gagne ou se perd.


Escartefigue

C'est pour ça que je me demande si Panisse coupe à cœur.


César

Si tu avais surveillé le jeu, tu le saurais.


Panisse (outré)

Eh bien, dis donc, ne vous gênez plus ! Montre-lui ton jeu puisque tu y es !


César

Je ne lui montre pas mon jeu. Je ne lui ai donné aucun renseignement.


M. Brun

En tous cas, nous jouons à la muette, il est défendu de parler.


Panisse (à César)

Et si c'était une partie de championnat, tu serais déjà disqualifié.


César (froid)

J'en ai souvent vu des championnats. J'en ai vu plus de dix. Je n'y ai jamais vu une figure comme la tienne.


Panisse

Toi, tu es perdu. Les injures de ton agonie ne peuvent pas toucher ton vainqueur.


César

Tu es beau. Tu ressembles à la statue de Victor Gélu.


Escartefigue (pensif)

Oui, et je me demande toujours s'il coupe à cœur.

(A la dérobée, César fait un signe qu'Escartefigue ne voit pas, mais que Panisse a surpris.)


Panisse (furieux)

Et je te prie de ne pas faire de signes.


César

Moi je lui fais des signes ? Je bats la mesure.


Panisse

Tu ne dois regarder qu'une seule chose : ton jeu. (à Escartefigue) Et toi aussi.


César

Bon. (Il baisse les yeux vers ses cartes.)


Panisse (à Escartefigue)

Si tu continues à faire des grimaces, je fous les cartes en l'air et je rentre chez moi.


M. Brun

Ne vous fâchez pas, Panisse. Ils sont cuits.


Escartefigue

Moi, je connais très bien le jeu de manille, et je n'hésiterais pas une seconde si j'avais la certitude que Panisse coupe à cœur.


Panisse

Je t'ai déjà dit qu'on ne doit pas parler, même pour dire bonjour à un ami.


Escartefigue

Je ne dis bonjour à personne. Je réfléchis à haute voix.


Panisse

Eh bien ! Réfléchis en silence … (César continue ses signaux) Et ils se font encore des signes ! Monsieur Brun, surveillez Escartefigue, moi, je surveille César.

(Un silence. Puis César parle sur un ton mélancolique.)


César (à Panisse)

Tu te rends compte comme c'est humiliant ce que tu fais là ? Tu me surveilles comme un tricheur. Réellement, ce n'est pas bien de ta part. Non, ce n'est pas bien.


Panisse (presque ému)

Allons, César, je t'ai fait de la peine ?


César (très ému)

Quand tu me parles sur ce ton, quand tu m'espinches comme si j'étais un scélérat … Je ne dis pas que je vais pleurer, non, mais moralement, tu me fends le cœur.


Panisse

Allons, César, ne prends pas ça au tragique !


César (mélancolique)

C'est peut-être que sans en avoir l'air, je suis trop sentimental. (à Escartefigue) A moi, il me fends le cœur. Et à toi, il ne te fait rien ?


Escartefigue (ahuri)

Moi, il ne m'a rien dit.


César (Il lève les yeux au ciel)

O Bonne Mère ! Vous entendez ça !

(Escartefigue pousse un cri de triomphe. Il vient enfin de comprendre, et il jette une carte sur le tapis. Panisse le regarde, regarde César, puis se lève brusquement, plein de fureur.)


Panisse

Est-ce que tu me prends pour un imbécile ? Tu as dit : "Il nous fend le cœur" pour faire comprendre que je coupe à cœur. Et alors, il joue cœur, parbleu !

(César prend un air innocent et surpris.)


Panisse (Il lui jette les cartes au visage)

Tiens, les voilà tes cartes, tricheur, hypocrite ! Je ne joue pas avec un Grec ; siou pas plus fada qué tu, sas ! Foou pas mi prendré per un aoutré ! (Il se frappe la poitrine.) Siou mestré Panisse, et siès pas pron fin per m'aganta !


(Il sort violemment en criant : "Tu me fends le cœur.")

Mike
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Message par Mike » 12 déc. 2005 à 22:36

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caoa54
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Message par caoa54 » 13 déc. 2005 à 1:20

Scène mémorable, c'est vrai!

Une de mes préférées, c'est de mémoire:

- Ah , la voilà cette petite Pomponette! la voila la Pomponette, la garce, la salope! Où elle était , la Pomponette? Elle était partie avec un chat de gouttière et le pauvre Pompom qui se faisait un sang d'encre..

Mais c'est trop mauvais, mon à peu près, et surtout sans l'axxent :( Image
Moi, pour ce que j'en dis... ©

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Message par Mike » 13 déc. 2005 à 17:52

ponpon ...pas... pompom ( pom pom c'est Ludwig van .. ou deep purple mais pas Pagnol

blague à part très beau film la femme du boulanger (non pas de Cincinnati


Mike :D fan des vieux films de Pagnol

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