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par Philippe » 23 janv. 2008 à 15:29
Suite de mon précédent post :
Robert, c’est prêt ! Dit-elle d’une voix câline.
L’homme contempla une seconde l’enfant qui ayant entendu sa mère se relevait de l’épais tapis persan sur lequel il avait étalé ses soldats de plomb auxquels il ordonnait des manœuvres savantes sorties de son imagination de garçon de 5 ans.
Il rangea ses lunettes dans leur étui qu’il posa sur le bureau devant lui.
Il coula un regard vers l’embrasure de la porte par laquelle la charmante apparition était repartie.
Son regard gris acier se perdit quelques instants sur les rayonnages qui entouraient la pièce, des livres rares, des statuettes précieuses, des morceaux de frises oubliées, un coffret, qu’aucun système d’alarme ne protégeait, renfermant une fortune en pierres précieuses offertes par quelque prince reconnaissant.
Une paire de jumelles de vision nocturne accrochées au dossier d’une chaise renaissance. Des cartes anciennes dans leurs rouleaux de peau de yacks. Un ordinateur portable voisinant des carnets de notes parcheminés par les intempéries et les aventures qu’ils leur avaient fallu traverser pour en arriver dans ce bureau cossu du quai Voltaire.
Avec un léger soupir il sourit, machinalement il passa ses doigts en peigne dans ses cheveux poivre et sel. Il posa ses mains puissantes et noueuses sur les accoudoirs et d’un coup de rein souple se releva.
Allez William, on y va, ne faisons pas attendre maman.
L’enfant au regard perçant comme son père, avait dans les traits la douceur du visage de princesse précieuse de sa mère.
L’homme s’approcha de celle ci, passa un bras tendre autour de sa taille, souleva un couvercle sur la cuisinière et huma gourmand : Nous allons encore nous régaler …
C’est une spécialité que me préparait ma nounou quand j’étais petite.
Quand tu étais petite, c’était à Bornéo ? demanda le garçon.
Ben oui, tu le sais bien, c’est là que nous nous sommes connus avec ton papa, et tonton William.
L’homme s’assit à la grande table de chêne massif qui trônait au centre de la cuisine. Son fils sur la droite et la place de son épouse face à lui.
Aux premières bouchées de ce plat exotique et parfumé, son regard se perdit dans le vague et son esprit vagabonda sur les rives du fleuve Yanu.
-- Encore un effort Commandant, et nous sommes arrivés gronda en s’arc boutant sur sa pagaie, un géant roux aux épaules aussi larges que la pirogue dans laquelle il se trouvait avec deux autres compagnons. Un rude gaillard et une frèle jeune femme.
-- J’espère que les informations de ce forban de Tran Nuc sont fiables, et que nous allons bientôt apercevoir les appontements du village de Bien Yen, lui répondu l’un homme aux bras noueux, aux traits énergiques, les cheveux coupés en brosse.
La jeune femme habillée d’une simple veste de toile kaki, trop grande pour elle, jetée sur une robe de soie rouge et jaune, parée de perles, jettait de temps en temps d’un coup d’œil furtif en arrière avec angoisse, elle vérifiait l’apparition de pirogues lancées à leur trousse depuis trois jours maintenant.
-- Toujours rien fit elle dans un souffle à ses deux compagnons qui appuyaient toujours avec force sur leurs pagaies.
-- Faut pas s’y fier commandant gronda le géant roux, z’ont plus d’un tour dans leur sac ces oiseaux là.
L’homme que son compagnon appelait commandant ne répondit pas. Il fixait devant lui dans le coude de la rivière qui se dégageait maintenant devant eux, l’apparition de quelques misérables cahutes qui formaient le petit village de Bien Yen. Il plissa des yeux comme pour affuter sa vision pourtant fort bonne, en secouant la tête.
-- Arrête toi Bill, Y a quelque chose qui cloche.
-- Z’avez raison commandant, c’est pas normal, répondit le colosse en posant sa pagaie en travers devant lui. Laissant la pirogue filer sur son ère. Semble aussi désert que la poche d’un bailleur de fond.
La suite dans quelques instants , jours , mois, on verra.
Philippe